«Je veux demeurer optimiste mais si jamais les activités ne redémarrent pas, j'ai bien peur qu'on devienne un village fantôme»,
a laissé tomber hier en entrevue au Journal de Montréal le maire de Saint-Michel-des-Saints, Jean-Pierre Bellerose, visiblement ébranlé par l'ampleur des événements.
Cette fermeture frappe directement plus de 600 travailleurs, qui gagnent plus de 50 000 $ par an, dont 218 à l'usine de copeaux orientés (OSB) et 104 à l'usine de sciage.
C'est donc le quart de la population de cette ville de 2500 habitants qui est touchée.
«L'industrie forestière génère des salaires de plus de 35 M$ annuellement. Nous sommes une ville mono-industrielle, et il faut nous inquiéter des répercussions de cette fermeture pour notre économie, qui dépend de la forêt», ajoute le maire de la ville, située à 150 km de Montréal.
Facteurs malheureux
Pour justifier cette fermeture, le géant américain Louisiana-Pacific a invoqué «un ensemble de facteurs malheureux», entre autres le prix élevé du bois, les coûts de transport, la hausse du carburant et la vigueur du dollar canadien.
«Cette fermeture (de l'usine de panneaux) est difficile, mais il s'agit d'une décision économique nécessaire», fait savoir le vice-président de la papetière, Jeff Wagner.
Les jours s'annoncent encore plus sombres pour l'usine de sciage qui, selon la compagnie, «n'est plus rentable depuis plusieurs mois».
Le conflit sur le bois d'oeuvre avec les États-Unis aurait contribué à affaiblir la position concurrentielle de la seule usine de sciage du groupe américain au Canada.
De façon sournoise
Aux abords de l'usine, dont l'accès était interdit, des travailleurs inquiets s'interrogeaient ouvertement, hier après-midi, sur les véritables motifs qui ont incité la compagnie à fermer les deux usines.
«On a été avisés mardi à 14 h 30 que l'usine allait fermer à 15 h. On a été pris par surprise, de façon sournoise. On est en droit de s'interroger», confie au Journal le président du syndicat des travailleurs de panneaux (FTPF-CSN), Serge Déziel, 54 ans, qui travaille à l'usine depuis 1989.
Il refuse d'envisager le pire des scénarios mais il reconnaît que d'autres papetières -- par exemple, Domtar à Lebel-sur-Quévillon -- ont fermé des usines au cours des derniers mois, en raison de l'instabilité de l'industrie des pâtes et papiers.
«On espère ne pas connaître le même sort que la population de Lebel-sur-Quévillon (aux limites de l'Abitibi). Les travailleurs à qui j'ai parlé sont découragés», soupire-t-il.
Et l'avenir?
Plusieurs travailleurs rencontrés par le Journal commencent déjà à jongler à leur avenir à Saint-Michel-des-Saints.
«Si ça dure deux ou trois mois, ce ne sera pas si mal et on pourra s'en tirer avec les prestations d'assurance-emploi.
«Mais je vais être obligé de me trouver un autre emploi à l'extérieur du village si ça ne bouge pa. J'ai une femme et deux jeunes enfants», dit Éric Boisvert, 38 ans, qui est à l'emploi de l'usine de copeaux depuis 17 ans.
Il ne s'attendait pas à une aussi mauvaise nouvelle.
«Je viens tout juste de m'acheter une auto neuve...», dit-il en grimaçant.
Avec la fermeture de son usine de Saint-Michel-des-Saints, dans Lanaudière, Louisiana-Pacific a informé ses clients qu'elle produira ses panneaux orientés dans deux de ses usines à Chambord, au Lac-Saint-Jean, et à Maniwaki, en Outaouais.
Le titre de Louisiana-Pacific a clôturé à 19,55 $ US, en baisse 0,66 %, hier à la Bourse de New York.